
Les prisonniers de guerre allemands doivent aller travailler dans la mine. Jean poursuit son récit : « À 9 heures, nous les regardions. Ils avaient un petit bout de pain. Nous étions une dizaine d’hommes et parmi nous, trois Allemands qui nous regardaient sans rien dire. Voilà que l’aîné d’entre nous, Fernand suivi de Léon se levèrent pour leur donner un bout de pain. Bien sûr, évidemment, ils acceptèrent. J’entends encore Fernand dire : « Ce sont des gamins. Ils n’en peuvent rien si on les a envoyés à la guerre. »
Chaque jour, ils recevaient le bout de pain. Les autres prisonniers qui étaient dans les autres puits étaient traités de la même façon. Ils recevaient du pain sur leur travail au fond des mines. Encore une fois, les gueules noires ont montré qu’ils avaient un grand cœur.
Par la suite, la Belgique a fait appel à la main d’œuvre étrangère. Ils en arrivèrent de tous les pays. Les races se distinguent à la surface mais au fond, nous étions tous des gueules noires. Tous ensemble, nous avons gagné la bataille du charbon
Grâce à notre charbon, notre pays fut le premier à avoir le pain en vente libre donc, plus besoin de timbres pour le pain mais cela au prix de beaucoup de souffrances humaines car nombre d’entre nous y ont laissé leur santé et même la vie.
Mes parents l’ont payé par beaucoup de souffrances car nous étions huit frères mineurs dont un tué à 22 ans. Les autres sont morts à cause de la silicose, un à 44 ans, 1 à 51 ans et 1 à 67 ans. Les autres étaient encore en vie toutefois atteints par la silicone.
Le gouvernement Van Acker s’est vanter d’avoir gagné la bataille du charbon mais les ministres ont oublié de dire que c’était à la gloire du mineur. Je dois dire qu’après être revenu depuis 2 mois en Wallonie, j’ai reçu une lettre du gouverneur me donnant l’ordre de reprendre le travail à Beringen au fond. Je lui ai renvoyé la lettre en lui disant que c’était mal de menacer un homme de 25 ans qui comptait déjà 11 années de travail au fond tout en ajoutant un mot de l’ingénieur de Mariemont pour prouver que j’étais bien occupé au siège numéro 6 comme ouvrier abatteur au fond. Voilà encore une preuve que les mineurs étaient mobilisés sur leur travail. Le gouverneur m’avait répondu de considérer sa lettre comme nulle et non avenue. Je n’ai plus cette lettre car je l’avais remise à l’ingénieur pour lui prouver que je n’étais pas obligé de retourner à Beringen. Je pouvais donc rester au puits numéro 6 à Trazegnies où j’ai continué comme ouvrier abatteur.
En septembre 1947, j’étais allé au cours du soir à l’école industrielle moyenne à Morlanwelz. Mon frère Joseph, Jean Desmet, Sedek Stany, Maurice Dolivier, Raymond Gamache et moi, nous nous retrouvions certains soirs pour nous entraîner et pour recevoir les conseils des anciens comme Jean-Baptiste Duquesne car nous avions commencé à l’âge de 14 ans.
Nous avions terminé l’école primaire en 5e ou 6e année. Nous avons tous réussi nos 2e et 3e années de cours car pour être porion dans la société des charbonnages de Mariemont Bascoup, il fallait être en possession du certificat de capacité et avoir suivi régulièrement pendant au moins 2 ans tous les cours de la section spéciale d’exploitation pour les branches suivantes : arithmétique, géométrie pratique, dessins de croquis ainsi que les premiers soins à donner aux blessés. Le certificat, je l’ai reçu le 30 juin 1949 et le 1er août de la même année, j’ai été nommé porion après avoir effectué un an de travail de surveillant.
Cette année-là et les suivantes nous étions huit frères au putts numéro 6 dont 2 à la surface Pierre et Albert et 4 au fond Auguste, Jean, Georges, Yvon.
À suivre
Jean le mineur