Un mineur parmi tant d’autres
Préface

Ils étaient seize enfants : 13 garçons et trois filles.
Le grand-père était mineur. Le père était mineur. Les fils furent mineurs de fond de taille. Jean devient chef de taille.
Ambiance de travail de volonté, de courage : voilà l’atmosphère de la taille qui vous pénètre et vous rend insensible à la fatigue.
Des hommes accroupis, invisibles l’un à l’autre, sont accrochés à la veine nourricière qu’ils poignardent sans répit, utilisant des stylets frappant à plus de 1000 coups à la minute. Derrière les hommes de taille suivent les boiseurs, les ouvriers chargeurs, les hiercheurs, les sclauneurs, les moulineurs, les rscouyeurs et tant d’autres presque tous jeunes gens bouillants et habiles.
Jean eut sous sa responsabilité des hommes de différentes nationalités. Dans la cabine de l’ascenseur, c’était : « Al wâde di Dju ! « comme disaient les mineurs.
Ils descendaient jusqu’à 900 m.
L’exploitation souterraine possède ses voies ferrées, ses wagons, ses chevaux, ses locomotives, ses courroies transporteuses …
La journée terminée, Jean se lavait sous la douche puis s’habillait proprement : chemise, cravate comme un employé. « Il faut valoriser le métier, disait notre mineur ! »
Le père atteint de la silicose, maladie des mineurs s’éteignit entouré de sa femme et de ses enfants.
Quand la mère tomba malade, elle fut recueillie, soignée et dorlotée par Yvon et son épouse Josée qui accueillait les frères et les sœurs rendant visite à la maman. Elle décéda à l’âge de 61 ans. Le médecbin traitant leur dit qu’elle était aussi usée qu’une femme de 80 ans.
Je garde un souvenir ému de la femme admirable qui éleva seize enfants et regrette de ne plus pouvoir la gâter.
Après la mine, Jean a servi chez les riches où il était estimé pour sa tenue nette, sa ponctualité, son service impeccable et sa bonne éducation.

En 1940, il fut rappelé comme tous les jeunes gens de 16 à 35 ans dans les centres de recrutement de l’armée belge. Il a été cantonné en France à Remoulins. Trois autres frères étaient aussi sous les drapeaux
Quelquefois pour les vendanges, il retourna chez ses amis français de 1940. Le petit salaire reçu lui permet de ramener son vin pour l’année, vin léger vieux de 2 ans pour la semaine et du Châteauneuf du Pape pour les fêtes de famille.
Son épouse José garde son mari et apprécie leur ménage où lui, a son coin, avec son pic, son casque et sa lampe de mineur.
Il a arrangé une douche avec des pavés sur les murs comme celles de la mine. Ils ont une pension et essaient d’en profiter un peu.
Josée est née à Beringen. Jean est de Courcelles.
Ils étaient des gueules noires.
Quatre des enfants reprenaient leur plus jeune frère colloqué à l’hôpital les « Marronniers » à Tournai. Pendant 30 ans tous les deux mois, ils le reprenaient 5 jours en congé pour qu’il ait le bonheur d’être un peu en famille et garde sa dignité d’homme et où il pourrait encore sourire parmi eux.
« Celui qui sourit est plus fort que celui qui se fâche, proverbe japonais »
Jean le Mineur.
Place à l’histoire de la vie de Jean le mineur dans les prochaines semaines.