Les lendemains de la catastrophe


Le lendemain, la reine Élisabeth en personne vint réconforter les familles. De nombreux télégrammes de condoléances affluèrent de l’Europe entière.

Après s’être heurté à d’innombrables difficultés de tout ordre, l’administration communale de Trazegnies a pu organiser des funérailles officielles de certaines familles car toutes les familles n’habitaient pas Trazegnies. La cérémonie fut programmée pour le samedi 13 mai. Auparavant, 17 cercueils avaient été ramenés dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville de Trazegnies transformé en chapelle ardente. Pour les funérailles chrétiennes, ce fut Monseigneur Himmer, évêque de Tournai qui officia.

Le samedi matin dès 8h30, le public fut admis à venir rendre hommage aux victimes. Des milliers de personnes s’étaient déplacées pour venir assister aux obsèques. Jamais, la place Larsimont n’avait connu autant de monde. Elle était littéralement noire de monde. Parmi les personnalités figurait Monsieur Duvieusart, ministre des Affaires économiques. Les rues qui relient l’église au cimetière étaient bordées d’enfants tenant un bouquet de fleurs. À 10 h, il fallut interrompre l’hommage dans la chapelle ardente. Pour faciliter l’organisation de la cérémonie, on décida que les cercueils seraient descendus à bras d’hommes par l’entrée principale de l’hôtel de ville. Parmi les fleurs, on distinguait la couronne de Son Altesse le Prince Charles, Régent du royaume. Sur le trajet, tous les corbillards étaient entourés de mineurs en tenue de travail. L’émotion était à son comble.

Il était impossible de faire rentrer dans l’église toute cette foule. Seules les familles et les personnalités purent y pénétrer. Les abords du cimetière étaient noirs de monde et là aussi, il avait fallu canaliser le funeste cortège. À 16 h, la cérémonie était, proprement dite, terminée.
Le dimanche 14 mai, ce fut au tour des victimes de religion orthodoxe d’être inhumées. Les membres de la délégation ukrainienne avaient tenu à porter eux-mêmes les cercueils contenant les restes de leurs compatriotes.

Le lundi 15 mai, se déroulèrent à Trazegnies, les funérailles du conducteur des travaux, Herman Chapelle et à Gouy-lez-Piéton, celles de Gustave Dauge. Pendant ce temps, à la clinique Louise de Morlanwelz, Yvon Sturbois et Julien Roelandts luttaient toujours pour leur survie. Hélas, Julien Roelandts décèdera durant la nuit du dimanche au lundi.


Yvon Sturbois restait donc l’unique rescapé de cette effroyable tragédie. Depuis l’annonce de la catastrophe, des collectes furent organisées dans tout le royaume et l’argent commençait à affluer vers les divers comptes bancaires ouverts à ce sujet.

Mais déjà, on voulait comprendre comment pareille catastrophe avait pu se produire et les langues commencèrent à se délier.

Tous les journaux de l’époque indiquaient que des dons en faveur des familles des victimes convergeaient vers Trazegnies. Dans cette presse, la liste de ces dons fut insérée pour ainsi dire chaque jour et ce, durant un certain temps. Le premier souci fut de gérer le plus vite possible tout cet argent et de rassembler tous les comptes en un seul. Pour se faire, une ASBL fut créée le 1er juillet 1951. Elle avait pour dénomination : ‘Comité d’aide aux familles de la catastrophe minière de Trazegnies ». Celle-ci avait comme président, Monsieur Émile Cornez, Gouverneur du Hainaut. Parmi les membres, on épinglera Monsieur François Nouwens, secrétaire communal de Trazegnies, Madame Denise Rachard, infirmière à Trazegnies, Monsieur Arthur Beguin, bourgmestre de Trazegnies et Monsieur Georges Simon, ingénieur civil. Le collège des commissaires était formé de Monsieur Gustave Chapelle, René Migeot et Fernand Plumier. Les archives de cette asbl nous apprennent qu’à la date de sa création elle disposait de 11.099.613, 89 francs belges y compris le versement de 1.950.993,90 francs belges émanant de la Croix Rouge. Tout cet argent fut réparti en portefeuille, bons de caisse à 4,5 %.

Pour la veuve, outre la pension légale, l’ASBL versait annuellement la somme de 20.000 francs belges plus 5.000 francs belges pour chaque orphelin et ce, jusqu’à leur majorité. Elle intervenait également dans les frais extraordinaires : médecin pharmacien hospitalisation, vêtements etc.
En cas de remariage, la rente était supprimée mais une dot de 32.000 francs belges lui était accordée. L’ASBL aidait parfois certaines familles pour le loyer ou l’entretien de la maison.

Lors de l’assemblée générale du 19 mars 1953, les statuts furent modifiés et un crédit spécial de 100.000 francs belges fut ouvert au profit des familles des victimes d’accidents isolés. Le but poursuivi lors de la constitution de cet organisme était d’éviter un mauvais emploi des dons. L’expérience avait prouvé que les craintes étaient fondées et que dans certaines familles, il ne serait rien resté si les sommes recueillies avaient été distribuées intégralement.

De nos jours, le montant de ces sommes paraît dérisoire mais dans les années 50 du siècle passé, c’était assez considérable voire une petite fortune.

Pour revenir à la catastrophe, tout le monde se demandait ce qui avait bien pu déclencher le drame et qui en étant en été responsable. Disons-le tout de suite, il ne nous appartient pas de désigner le ou les coupables dans le cadre de cette rubrique mais on peut s’interroger.

À suivre
Jean le mineur

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