Le travail dans la taille 27.

Maintenant, je vais raconter en premier lieu la vie dans la taille n° 27. C’est au début de l’année 1950 qu’on a commencé à exploiter cette taille. Je travaillais comme porion au premier poste c’est-à-dire à l’abattage du charbon. On a placé mon frère Joseph parmi les ouvriers nécessaires au bon fonctionnement de la taille. Il a pris notre frère Auguste et ses deux beaux-frères Goliath et Édouard Noël comme ouvriers abatteurs et parmi les manœuvres, nos frères Georges et Yvon plus son neveu Willy Noël.

C’était une belle taille de 80 cm à 1 m de hauteur, un toit très solide avec une pente juste pour que le charbon puisse glisser dans les couloirs jusqu’à la trémie. Là, on chargeait les chariots, sauf sur le dessus de la taille vers 490 m (le niveau, état plus plat. C’est pourquoi on a placé des couloirs oscillants actionnés par un moteur à air comprimé. Mon frère Yvon avait la responsabilité de son bon fonctionnement. Il devait resserrer les écrous des boulons des couloirs, retendre les chaînes qui supportent les couloirs.

Il devait, en plus de sa lampe électrique, avoir une lampe à benzine pour le dépistage du grisou et je crois qu’il avait souvent peur surtout le matin quand il devait se préparer pour la descente au fond du puits. Il devait arrêter le moteur étant prévenu par une cloche et le remettre en marche aux trois coups de cloche.

Il était aimé de tous les abatteurs surtout ceux qui étaient tout près du moteur et chaque jour, au moment du casse-croûte, il recevait des friandises. Les ouvriers qui étaient tout près de lui étaient des Ukrainiens et des Polonais. Un peu plus bas dans la taille, son camarade Willy Noël âgé de 14 ans comme lui ouvrait ou fermait un barrage selon la quantité de charbon. Voilà que la taille 25 s’arrête donc fini le charbon, on doit préparer une nouvelle taille et commencer un nouveau bouveau au midi et un montage en veine au levant de ce bouveau.

La taille 27, elle, avançait au couchant de ce bouveau. Comme à ce moment, je n’avais pas une taille en service, je voyageais de 320 m à 490 m et 570 m. Dans les niveaux supérieurs, je surveillais la bonne marche du désameublement, le retrait des bêles et étançons métalliques dans les tailles terminées et aussi veiller à l’enlèvement des cintrages dans les galeries qui ne servaient plus. C’est ainsi qu’au début de février 1950, je me trouvais au niveau 570 mètres, je rencontrai un inspecteur des mines qui venait de la veine de derrière donc du montage. Il me dit : « Voilà j’ai fait revenir les ouvriers du montage car après contrôle, j’ai constaté qu’il y avait trop de grisou pour continuer à travailler. Je les ai donc envoyés à la taille 27 pour achever le travail de nuit. » Les jours suivants, on a laissé une havée de la taille 27 sans remblayer et on l’a fait servir de cheminée pour évacuer le grisou de montage mais au bout de quelques jours, on s’est rendu compte que ce n’était pas suffisant. Les délégués syndicaux venaient dire au bureau que les ouvriers se plaignaient de maux de tête. Donc, il y avait toujours du grisou dans l’aération de la taille 27. Alors, les ingénieurs ont décidé de construire un mur à l’entrée de la galerie qui conduisait au montage. On a placé des tuyaux dans le mur et la tuyauterie a été raccordée au puits de sortie d’air pour l’évacuation des gaz.

Au poste de nuit, c’était Donate Mario, le maçon aidé d’un manœuvre qui maçonnait le mur et Alexandre Mornaque, ajusteur qui plaçait les tuyaux dans le mur aidé de deux manœuvres car il y avait environ 200 m de tuyaux à placer pour arriver au puits de retour d’air. Alors la tuyauterie installée, chaque jour la sortie du grisou était contrôlée par les chefs porions et aussi par le conducteur et les ingénieurs.

On était tous satisfaits au bout de quelques semaines de voir le grisou sortir de la tuyauterie. Au début du mois de mai, il était contrôlé par les ingénieurs qu’il n’y a plus que 1 % voire un demi pour cent de grisou. J’ajoute un croquis pour montrer comment on pouvait détecter la teneur du grisou de l’air avec la lampe à huile et la lampe de benzine. Ces deux lampes étaient appelées de sûreté. La détection ou la recherche du grisou se fait le plus aisément à l’aide de la lampe de sûreté. Puisque la teneur en grisou dans l’air qui sortait du tuyau n’était plus explosive, les ingénieurs ont décidé de faire ouvrir une brèche dans le mur pour aller se rendre compte sur place dans la galerie et le montage qui dégageait le grisou.

A suivre

Jean, le mineur.

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