Travail au n° 6 de Trazegnies

Je vous prie d’excuser ma façon de m’exprimer ainsi que toutes les fautes d’orthographiques que j’ai pu commettre. Je n’ai pratiquement pas connu l’école. Âgé de 14 ans et mon frère Joseph de 16 ans, nous sommes descendus dans la mine non seulement pour gagner le pain de la grande famille que nous étions mais aussi parce que notre père était déjà malade de la silicose. Nous voulions aussi gagner la bataille du charbon et redresser l’économie de notre pays dans les années 1945 – 1946 jusque 1950.

Plus tard, on a commencé à chômer 2 jours par mois et malgré cette situation, les immigrés continuaient à arriver.

Dans les mines, il n’y avait pas de sécurité, ni d’hygiène et l’on nous demandait d’abattre de plus en plus de charbon, de toujours augmenter le rendement journalier. Plus grave encore, il arrivait que les patrons diminuent le prix du mètre de charbon abattu pour forcer les abatteurs en veine* à produire plus. Tout le monde sait très bien que tous les ouvriers essaient toujours de gagner plus pour le bien-être de leur famille.

Moi, Jean le mineur, parmi tant d’autres, j’ai commencé en septembre 46 au numéro 6 à Trazegnies – Piéton. J’ai débuté comme ouvrier abatteur en veine de charbon.

Je revenais de Beringen où je travaillais en maillot de bain car il faisait très chaud à 988 mètres de profondeur. Après avoir terminé ma première journée au numéro 6, j’ai dit à mon épouse : « Je vais terminer ma vie de mineur jusqu’à la pension car les travaux surtout les tailles sont très bien aérées mais il me faudrait un pull-over car il fait plus froid ici ». Malgré tout, il y avait les dangers de la poussière, la soif et surtout la crainte d’être coincé à cause des bois qui s’écrasent et qui se cassent en deux d’un coup sec sous la pression de la pierre du toit. Quand le toit laisse tomber de petites pierres, certains ouvriers croyant que celui-ci était sur le point de s’effondrer, se sauvaient. Alors, nous les anciens, nous les rappelions et nous les aidions à renforcer le soutien rapidement. On plaçait de nouvelles bêles de doublage avec étançons, des bois de soutien dont le diamètre est volumineux selon la hauteur de la veine. Dans certaines tailles, on devait placer des branchettes de fagots entre les lambortes ou esclimpes. La moindre erreur pouvait coûter la vie aux jeunes et aux nouveaux mineurs.

J’ai été blessé gravement dans une taille puis j’ai été enfermé dans un montage à cause d’un éboulement à Beringen. C’est pourquoi arrivé à Trazegnies au numéro 6, fort de mon expérience de 10 ans au fond de la mine, en 1947, j’ai été nommé surveillant moniteur. En août 1949, j’étais nommé porion car j’avais suivi les cours de la section exploitation des mines et j’avais reçu mon certificat de capacité avec distinction le 3 juin 1949

J’avais également l’expérience du boisage métallique que j’avais appris à Beringen. C’est pourquoi j’ai dirigé l’installation du soutènement métallique « bêles et étançons » à la taille 30 au siège numéro 6. Un seul ouvrier connaissait cette nouvelle méthode et il m’a bien aidé au début. C’était Joseph Giesling qui avait connu les étançons métalliques dans les mines d’Allemagne où il avait été prisonnier. Comme je l’ai déjà dit, on avait la chance que les tailles, les bouveaux et les galeries étaient bien aérées et on ne rencontrait pas souvent du grisou. Je crois bien que c’est la cause de la catastrophe du 11 mai 1950 car les porions, chefs porions, conducteurs et ingénieurs n’avaient jamais travaillé dans les mines de 3e catégorie.

Les charbonnages sont placés comme suit :

Première catégorie : peu grisouteux comme l’était le numéro 6
Deuxième catégorie :  les grisouteux
Troisième catégorie : les très grisouteux

Mais voilà, on a rencontré pour la première fois, une veine de charbon très grisouteuse à l’étage 570 mètres.

  • Les bouveaux : galerie de traverse d’une veine
  • Demande d’aide : « Que signifient les termes techniques « bêle , lamborte, esclimpe » ?

À suivre

Jean le mineur

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