La famine

Au Moyen-Âge, les guerres incessantes ruinaient les récoltes et les famines furent nombreuses. Elles se multiplièrent surtout au 14e siècle dévastant de grandes régions surtout pendant la guerre de 100 ans. En France, on instaura « le pacte de la famine » qui consistait à acheter du blé pendant les bonnes années pour les revendre au prix fort lors des années de disette. Cette pratique ne profitait qu’au roi et elle fut un des éléments déclencheur de la Révolution de 1789.

Chez nous, au 14e siècle, les campagnes présentaient un triste aspect. Seules, les terres avoisinant les habitations étaient cultivées. Lorsque les périodes de famine subsistaient, on rencontrait sur les bords de simples sentiers ou de mauvais chemins reliant les villages, de nombreux cadavres humains morts de faim ou de maladies épidémiques. Les cadavres étaient souvent ceux de gens venus du Nord qui croyaient que la récolte avait été meilleure en Wallonie.

Les récoltes étaient souvent perdues, c’est ainsi qu’en 1845, la récolte des pommes de terre a été anéantie à Montbliart par suite des intempéries.

En 1709, l’hiver fut très rude et la récolte fut mauvaise et les arbres fruitiers furent presque tous morts. Les récoltes étaient souvent mauvaises non seulement à cause des conditions climatiques défavorables mais aussi parce que les méthodes de culture étaient encore archaïques.

Bien souvent l’Eglise et le Seigneur ajoutait au malheur des gens de nouvelles dîmes. En 1764, le seigneur de Trazegnies établit une dîme sur les canadas, la navette* et le colza. À ce propos, il est bon de signaler que le canada ou pomme de terre était cultivé chez nous bien avant que Parmentier tente une expérience publique de la culture de cette plante sur 50 arpents à la plaine des Sablons à Neuilly. Cette expérience fut tentée après la famine de 1785 avec l’appui de Louis XVI. La charte établissant la dîme sur les canadas fut conservée à Trazegnies

Dans son histoire de Belgique, H Meunier parle de bandes de brigands qui infestaient nos bois et nos campagnes. En réalité, ces bandes étaient de paysans qui prenaient aux riches pour donner aux pauvres. Qu’auraient-ils pu voler au peuple? On se souvient des femmes brigands de Saint-Aubin, Morialmé ou la bande de Thomas Signorel à Muno. En 1602, cet homme était ce brigand bien aimé qui se dressa en défenseur du peuple contre les exactions des seigneurs qui opprimaient les serfs.

Ayant appris à lire et à écrire, il comprenait d’où venait les souffrances des populations. Il était l’ami de la sorcière du village car il ne croyait pas aux maléfices dont on accusait cette femme. Devant tant de misère, il rançonnait les riches pour aider les pauvres. Capturé, il fut promptement jugé par le clergé et les propriétaires terriens cossus. Il fut condamné à la pendaison. La corde ayant été coupée avant que la mort ne survienne, il fut égorgé par le bourreau. Son souvenir reste encore gravé dans la mémoire du peuple de Muno et de Florenville.

*La navette est presque similaire à la graine colza, la différence réside dans la saveur plus amère de cette dernière

**Thomas Signorel, robuste gaillard au sang chaud, amoureux, généreux, maçon, à ses heures paysan et braconnier, vit à Muno au 18e siècle à l’heure de l’inquisition de rigoristes jésuites de Liège. Thomas le rebelle va braver l’autorité des nouveaux maîtres. Se révolter contre l’injustice et l’arbitraire, gagner le respect et l’admiration des Munaçois et par là même, s’attirer la rancœur puis la colère de ceux qui disposent du droit de justice.

Roger Nicolas

À suivre

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