Choix de jeunesse
L’article précédent se terminait par cette phrase : « Cela eut des répercussions sur nos orientations politiques ».

En effet, mes copains et moi, quand nous eûmes atteint l’âge de 18 et 20 ans, nous avons dû choisir notre voie. Le monde chrétien ne nous tentait plus guère. Certes, il y avait du bon dans leur doctrine. Leur enseignement n’avait pas été mauvais. « Aimez-vous les uns , les autres. Faites le bien. Faites la charité. Ne volez pas. Ne tuez pas ». Tout cela contient des valeurs sûres. Malheureusement, cela ne cadrait pas avec les actes de certains chrétiens qui avait pour mission de nous enseigner le bien.
Nous venions de la classe ouvrière que l’on flétrissait. Le pape bénissait les armes de Mussolini. C’était l’époque de la guerre d’Espagne où l’on assassinait d’honnêtes citoyens. Et chez nous, les rexistes prononçaient des discours haineux contre les étrangers … qui étaient aussi nos amis. Tout cela choquait notre idéal de chrétiens. Faites ce que je dis mais pas ce que je fais. C’était le slogan favori de ces faux chrétiens qui nous dirigeaient. Où était l’enseignement du Christ dans tout cela ?
Insensiblement, nous étions arrivés à l’âge où l’on fait un choix idéologique définitif pour la vie. Le catholicisme ne correspondait plus à notre idéal . Nous jugions aussi les socialistes trop sectaires. Le gros Pipippe et sa bande nous avaient dégoûtés avec leurs fadaises et c’est tout naturellement que nous nous sommes dirigés vers le communisme.
En juillet 948, le Parti communiste de Marcinelle avait organisé une fête champêtre sur le terrain Grisart situé rue de la Tombe. Je m’y suis rendu avec quelques copains de la rue. Les communistes nous firent un accueil chaleureux. Après plusieurs sambas, javas et autres entrechats bien roulés à la mode en ce temps-là. Nous avons beaucoup discuté avec les militants de Marcinelle. La soirée fut très agréable. Après quelques jours et moult discussions entre nous, nous prîmes la décision de former une section de la Jeunesse communiste au quartier de la Villette. Ce mouvement n’existait pas à Marcinelle à cette époque. Ce sont donc les anciens élèves de l’école catholique qui fondèrent la section. J’ai perdu la foi vers l’âge de 18 ans mais mes compagnons quant à eux la conservèrent. Je n’ai jamais malgré tout renié l’enseignement que j’avais reçu dans cette école. Il avait été bon. C’est l’église qui s’est perdue .

Les copains et moi qui avions créé la section, habitions tous la rue des Grogères. Il y avait Jean Albert, Pierre Gaspard, Daniel Aldruide et moi-même. On se réunissait chez Victor Charles qui habitait la rue. Ce vieux bolchevik avait une particularité : sa maison était entièrement tapissée de pages de la revue « Union soviétique ». Le camarade Staline avait la place d’honneur sur la cheminée.
La première étonnée fut Suzanne Andrieux, ancienne résistante qui se demandait qui étaient ces farfelus qui avait formé une section de la Jeunesse communiste à l’insu du parti.
A suivre
Récit de Roger Nicolas.